NIGHT CALL : ses nuits sont moins belles que vos jours

NIGHT CALL - Nightcrawler affiche France Jake Gyllenhaal - Go with the BlogNIGHT CALL s’empare d’un sujet très américain : chaque nuit à Los Angeles, des chasseurs d’images à sensation parcourent la ville californienne, pour filmer et photographier les accidents de la route sanglants, les cambriolages, les incendies, ou autres bagarres de couples un peu musclées. Les images, filmées caméra au poing, ouvrent au petit matin les JT des chaînes locales, friandes de ces faits divers où cohabitent violence, blessés et parfois aussi, décès.

Lou Bloom (Jake Gyllenhaal) est un pauvre type célibataire et au chômage. Quand un soir au volant de sa voiture, il découvre par hasard l’existence de ces paparazzis de quartiers, qui négocient chaque nuit à prix d’or avec les chaînes télévisées locales, les images qu’ils captent sur le vif, Lou Bloom se dit qu’il peut tout à fait faire pareil pour gagner sa vie. Il se lance alors dans des virées nocturnes dans Los Angeles, en quête des accidents et cambriolages les plus spectaculaires … jusqu’à ne plus avoir de limites !

Dan Gilroy passe derrière la caméra pour la première fois avec NIGHT CALL. Connu jusque lors en tant que scénariste, il signe à 55 ans son premier long-métrage comme réalisateur, sur un sujet sulfureux et complexe, qui renvoie chacun à son propre voyeurisme : car il n’y a pas de paparazzis et de chaînes de télé à scandales, sans public et téléspectateurs derrière.

NIGHT CALL interroge donc cette curiosité malsaine intrinsèque à notre société contemporaine, où les reporters d’images sensationnelles sont prêts à tout pour capturer les évènements les plus spectaculaires, les plus violents, quitte à s’affranchir de la loi.

NIGHT CALL - Nightcrawler image du film 2 France Jake Gyllenhaal - Go with the Blog
Passionnant par son sujet, NIGHT CALL présente aussi un vrai intérêt d’un point de vue cinématographique : s’appuyant sur une mise en scène très esthétisée, que certains compareront à celle de DRIVE de Nicolas Winding Refn (les deux films partageant de nombreux points communs : Los Angeles, beaucoup de séquences de nuit, en voiture, etc …), les virées nocturnes du personnage de Jake Gyllenhaal bénéficient d’un gros travail sur les lumières, l’utilisation des reflets, des néons des magasins notamment. Cette esthétique confère une atmosphère singulière à ces nuits urbaines, une tension dont la progression tout au long du récit est particulièrement bien amenée.

En revanche, le film souffre de quelques maladresses dans sa réalisation : certaines scènes, à force d’être trop stylisées, finissent par perdre de leur réalisme, et donc par détacher le spectateur de la réalité qui nous est montrée. Le rythme n’est pas non plus toujours parfaitement maîtrisé, même si on le reconnaît tout à fait, on ne s’ennuie jamais !
NIGHT CALL - Nightcrawler image du film 4 France Jake Gyllenhaal - Go with the Blog
Mais surtout, NIGHT CALL bénéficie de l’interprétation très impliquée et saisissante de l’ensemble de son casting, à commencer par Jake Gyllenhaal. L’acteur s’est investi corps et âme dans ce rôle (n’hésitant pas à renoncer à participer au Disney INTO THE WOODS pour tourner NIGHT CALL !) : il a perdu neuf kilos, et son corps aminci avec ses traits du visage ultra tirés, font du personnage de Lou Bloom un individu inquiétant. Reporter d’images autodidacte, solitaire, maniaque, limite sociopathe, ce pauvre type s’engouffre tête baissée dans cet eldorado nocturne où il semble si facile de gagner très vite de l’argent.

Avec ses yeux qui donnent presque l’impression de sortir de leur orbite, Jake Gyllenhaal incarne avec brio ce personnage cynique, sans moral, qui ne s’est fixé aucune limite pour aller toujours plus loin dans le scoop. Pris au piège de sa propre machine, il se sent grisé par ses réussites.

À travers le portrait de cet homme, le film dessine aussi en filigrane une peinture de nos sociétés occidentales et urbanisées, où l’individu cherche désespérément à exister dans le regard des autres. Pour le personnage de Lou Bloom, à un moment donné ce n’est pas tant l’argent qu’il gagne qui le stimule, mais le fait d’être le premier et le meilleur, de séduire la rédactrice en chef du JT matinal sur une chaîne locale (campée par une Rene Russo glaciale et castratrice).

NIGHT CALL - Nightcrawler image du film 3 France Jake Gyllenhaal - Go with the Blog


En dépit de quelques maladresses et d’une esthétique un peu trop marquée pour un film qui aurait pu gagner à viser davantage l’hyperréalisme, NIGHT CALL aborde avant tout un sujet profondément contemporain, complexe, violent, et qui bouscule le spectateur. Porté par un Jake Gyllenhaal exceptionnel qui pourrait aller chercher une nomination aux Oscars, ce long-métrage ne devrait laisser personne indifférent.

Page Facebook du film NIGHT CALL.

NIGHT CALL, sortie en France le 26 novembre 2014.

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Article rédigé par Elle.

NIGHT CALL - bandeau visuel film Nightcrawler Jake Gyllenhaal - Go with the Blog

8 réponses sur « NIGHT CALL : ses nuits sont moins belles que vos jours »

Alors tout d’abord je dirais juste KKKYYYYAAAAAAA JAKKEEEEEE lol même tout maigrichon et avec ses yeux globuleux il est sexy (fin du moment de groupitude).
J’ai adoré , il n’est pas si hard que ça je trouve (visuellement parlant)
Il a bien travaillè la psychologie de fou de Lou et sa maigreur accentue tout sont côté barge,maniaque et sociopathe.
C’est une bonne satire des Américains.
En plus on ne voit que lui tout le temps ce qui est bien pour ses groupies lol.

Je l’ai écouté dans une émissions sur France inter, il parle vraiment très bien de tout ça et il a dit qu’il avait vraiment pété le miroir et qu’il a eu plein de points, il trop fort ^^

Bonjour,

Merci pour ton avis sur le film (et sur Jake Gyllenhaal :-))

Plus qu’une satire des américains, on dira surtout une critique des medias et de cette course frénétique au scoop racoleurs. Mais comme on dit aussi dans notre article, le film invite également à réfléchir sur notre propre voyeurisme.

Un film original, de sujet très actuel pour une critique sur la chasse au scoop à tout prix et au voyeurisme plutôt qu’a la réelle information… Jake Gyllenhaal excelle dans ce rôle de Lou Bloom, un voleur psychopathe complétement amoral et glaçant mais aussi très intelligent et brillant… avec une atmosphère particulière et de très bon dialogues, les 2 heures de film passent très bien même si la bande annonce est trompeuse, le rythme du film est globalement plutôt lent avec quelques scènes d’action dont une mémorable…

Bonjour Spe64,

Merci pour ton avis très pertinent sur le film !
Tu fais bien de notifier que la bande-annonce ne reflète pas exactement le film et son atmosphère. Je te rejoins en tout cas sur totu ce que tu dis 😉

À bientôt sur Go with the Blog !

Satire, entre autre, du monde des médias à la recherche de la part d’audience. C’est un petit peu la partie immergée de l’iceberg. En dessous il y a tout un monde qui cherche désespérément à tenter de survivre à la dure loi de la jungle, urbaine et, plus vicieuse, pernicieuse, celle du profit. Que faire pour s’en sortir lorsqu’une société, celle des états, acquise a la cause du marché, rejette et crée en toute (in)conscience les démunis ?

Si vous êtes sociopathe, avéré, selon l’angle que Gilroy à choisi de nous présenter ici, cela donne Nightcrawler. En grossissant, ou plutôt en faisant ressortir, les traits de la réalité globale de l’ordre du monde. Où comment faire fructifier sa petite entreprise, sa startup.
Pointer les lois d’un marché virtuel que son personnage (et quel personnage) s’approprie via une toile toute aussi virtuelle (le titre original semble évoquer également les bots informatiques).
Gilroy prolonge la vision pessimiste-réaliste de son scénario, dans le moindre personnage et jusque dans sa manière de cadrer.

Surtout n’allez pas voir Night call avec l’accroche Drive, hormis LA et ces voitures obligatoires, Night call n’a rien à voir. Et c’est même contre productif, niveau pub, ironiquement comme si la distribution passait à côté du film. Il se rapproche plus de Taxi driver, dans son ambiance nocturne mais surtout dans le type de type, sociopathe à la dérive prés à tout pour prouver qu’il existe, que nous montre le film.

Cela nous amène à la performance de Jake Gyllenhall, acteur de l’année, totalement ahurissant, presque méconnaissable à la fois physiquement avec son look émacié, et dans son jeu qui semble perdre, avec ce rôle et cette interprétation, toutes les mimiques que garde l’homme derrière l’acteur, même le plus doué. Proprement hallucinant.

Salut widscreen,

Merci pour cet avis très pertinent, et vraiment passionnant à lire ! Merci beaucoup.

Ce que tu dis au début, est très juste : la dénonciation des medias locaux racoleurs américains, est la partie visible d’une critique + large et + complexe que propose le film, sur effectivement nos sociétés modernes, impitoyables et qui livre chacun à son propre destin.

Et je te rejoins aussi sur le fait qu’il faut passer outre la promo du film en France, qui joue le rapprochement avec DRIVE de Nicolas Winding Refn. Tu as tout dit, je n’ajoute rien sur ce point 🙂

Jake Gyllenhaal, acteur de l’année carrément pour toi ?! Bon, voilà un vrai choix, on va voir cela au moment des traditionnelles remises de prix aux USA.

Mais tu vises juste en tout cas en décrivant son travail de comédien dans ce film : c’est hyper subtil, mais tellement intelligent ! On sent qu’il a travaillé avec beaucoup de précision son personnage, pour ne jamais le caricaturer. Clairement, Gyllenhaal porte le film et tient un de ses meilleurs rôles, on est absoluement d’accord !

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