Si vous avez vu CONJURING : LES DOSSIERS WARREN sorti à l’été 2013 en France, vous n’avez sans doute pas oublié le minois disgracieux et le sourire maléfique de cette poupée enfermée à double tour dans une boîte en verre, à l’intérieur de la fameuse ‘salle des trophées’ du couple d’exorcistes les Warren. Très vite après le succès de CONJURING, la production d’un spin-off autour de cette poupée fut mise sur les rails. Mais un spin-off, c’est quoi ? Il s’agit de prendre un élément secondaire d’un film, la plupart du temps un personnage, et de lui dédier un film à part entière où ce personnage devient le centre d’une nouvelle histoire.
ANNABELLE se paye donc l’affiche et nous arrive à peine un an après CONJURING. Le réalisateur de plus en plus en vue James Wan, a délaissé cette fois-ci la caméra pour se contenter du rôle de producteur. Il faut dire que le garçon est bien occupé puisqu’il est déjà en train de travailler sur une suite à CONJURING …
Si les histoires de poupées ont déjà inscrit quelques grands classiques au Panthéon des films d’horreur, ANNABELLE est-elle suffisamment méchante et vilaine pour remettre le genre au goût du jour, avec le même panache que CONJURING quand il dépoussiérait le genre de l’exorcisme ?
ANNABELLE s’ouvre sur une séquence quasiment à l’identique qui se trouvait déjà dans CONJURING. Elle vient nous rappeler l’un des premiers méfaits de la poupée, quand elle transformait en cauchemar le quotidien de jeunes étudiantes infirmières installées en colocation. Cette petite piqûre de rappel en forme de clin d’œil à CONJURING, n’est qu’un prétexte pour faire le lien entre les deux films, car l’histoire qui va nous intéresser est toute autre.
Dans les années 70, Mia et John forment un jeune couple bien sous tous rapports. Ils attendent l’arrivée de leur premier enfant tandis que John prépare son internat de médecine. Mais une nuit, leurs voisins, un couple âgé, sont sauvagement assassinés par les membres d’une secte satanique. Traumatisés, John et Mia finissent par déménager et s’installer dans un appartement en ville.
Quelque temps avant cette tragédie, John a offert à Mia une poupée de collection très rare, qui comble alors de joie la jeune femme. Elle l’installe dans la chambre du futur bébé, aux côtés de tout un tas d’autres poupées. Mais cette nouvelle venue n’est pas tout à fait comme les autres …
D’un point de vue scénaristique, ANNABELLE ne se démarque pas par son originalité. L’idée d’une poupée trouble-fête au sein d’une jeune famille stéréotypée et idyllique, tout cela est plutôt convenu et très balisé.
Non, ce qui est à creuser dans le film ANNABELLE, ce sont ses très nombreux rapprochements avec le ROSEMARY’S BABY de Roman Polanski, sorti en 1968. D’abord, l’histoire d’ANNABELLE se déroule au début des années 70, offrant ainsi des couleurs, des décors, des tenues de la même époque que le film de Polanski. Dans les deux films, on a affaire à un jeune couple qui attend son premier enfant.
Mais les choses vont encore plus loin. Comme Mia Farrow dans ROSEMARY’S BABY, l’actrice principale dans ANNABELLE (qui, ironie ou pas, se nomme Annabelle Wallis) est une jeune femme frêle, au teint pâle, et blonde. Les deux personnages féminins sont des femmes au foyer, très élégantes, aux tenues soignées.
Il faut aussi noter que le couple dans ANNABELLE porte les prénoms de John et Mia, hommage évident aux acteurs John Cassavetes et Mia Farrow dans le film de Roman Polanski. Et puis surtout, il y a les décors. On retrouve ainsi dans ANNABELLE un appartement avec de nombreuses pièces et aux couloirs interminables, à tel point que par moments le spectateur y perd son sens de l’orientation et ne sait plus très bien comment est agencé cet intérieur, lieu de toutes les terreurs ! Roman Polanski avait fait de cet appartement une figure (tentaculaire) à part entière de son film d’horreur en 1968, et dans ANNABELLE cette même idée est clairement exploitée avec les mêmes intentions.
On pourrait continuer encore un bon moment à énumérer les multiples références au film de Roman Polanski présentes dans ANNABELLE. Mais au-delà de l’inventaire, si on en parle si longuement, c’est parce que cet hommage clairement appuyé au cinéaste et à son film culte, a tout de même une étrange saveur …
En effet, ANNABELLE cite dans le même temps au début de son récit, à travers un message radiophonique, le meurtre terrible de Sharon Tate en 1969, actrice et épouse de Roman Polanski à cette époque. La jeune femme a été sauvagement assassinée à son domicile par des membres de la secte de Charles Manson, alors qu’elle était enceinte de huit mois.
Vous comprenez alors très vite que le meurtre des voisins de John et Mia dans ANNABELLE, au tout début du film, se réfère assez explicitement à l’histoire de Sharon Tate, puisque la secte de Charles Manson y est directement évoquée.
Il y a ainsi quelque chose d’assez dérangeant dans ce mélange entre l’hommage appuyé au film culte ROSEMARY’S BABY, et l’évocation à plusieurs reprises (et sans équivoque possible) du plus grand drame de la vie personnelle de Roman Polanski.
ANNABELLE remplit gentiment sa mission de spin-off, et surtout d’interlude pour faire patienter le public en attendant la sortie de CONJURING 2 pour fin 2015 – début 2016.
Usant de mécaniques de la peur assez classiques (portes qui claquent, appareils ménagers qui se mettent en marche tout seul, poupée qui n’est jamais à l’endroit où on l’a laissée, …), ANNABELLE offre au spectateur quelques petites sueurs froides, plus particulièrement dans la première moitié du film. Une fois que les esprits maléfiques ont décidé de prendre les choses en main, on perd assez nettement en tension et en angoisse, car tout devient relativement prévisible.
Au final, on retient une très bonne séquence d’ascenseur, et des interrogations assez perplexes quant à cet étrange lien avec l’oeuvre et la vie personnelle de Roman Polanski. À choisir, on préférait quand CONJURING rendait hommage à L’EXORCISTE de William Friedkin.
En bonus :
On vous fait découvrir ci-dessous les vraies photos d’époque de Lorraine Warren avec la poupée maudite qui a, semble t-il, inspiré directement l’histoire d’ANNABELLE.
ANNABELLE, sortie en France le 08 octobre 2014.
[youtube]http://youtu.be/LGeEXd-QM-s[/youtube]
Article rédigé par Elle.
4 réponses sur « ANNABELLE : Rosemary’s Barbie »
Le genre de film après lequel je dors avec la lumière pendant 1 mois.
En tout cas merci pour le parallèle avec Polanski, je regarderais le film avec un autre œil du coup.
Salut Olivier,
Merci pour ton message ! 🙂
C’est le genre de film qui fait grimper ta facture d’électricité, si je comprends bien ! 😉
Ravie que le parallèle avec Roman Polanski t’ait intéressé, c’est cool.
[…] Notre article complet sur ANNABELLE à lire ICI. […]
[…] la comédienne anglaise Annabelle Wallis que l’on avait vue dans le film d’horreur ANNABELLE ; et comble de joie, lors de la seconde saison de la série, l’excellent Tom Hardy fait une […]