Cinéaste et photographe, Larry Clark a une obsession dans son cinéma depuis 20 ans : la jeunesse. Personnage incontournable de la contre culture et de la street culture, il s’est passionné pour les jeunes gens dès les années 60, en les photographiant.
Avec son premier long-métrage sorti en 1995, KIDS, il mettait un grand coup de pied dans la fourmilière, livrant un témoignage à vif sur la jeunesse américaine sans repères du milieu des années 90, touchée de plein fouet par le virus du Sida. Ce film révélait aussi de jeunes comédiennes, Chloë Sevigny et Rosario Dawson.
Vingt années plus tard, THE SMELL OF US nous est présenté comme la conclusion de la trilogie sur la jeunesse filmée par Larry Clark, incluant donc KIDS et KEN PARK sorti en 2002.
THE SMELL OF US a été entièrement tourné à Paris, sur un scénario du français Mathieu Landais, jeune poète de 22 ans connu sous le nom de S.C.R.I.B.E.
Pour parler de THE SMELL OF US, il faut commencer par dire deux choses plutôt essentielles : soit vous connaissez déjà le cinéma de Larry Clark et vous êtes parés pour voir ce film ; soit vous n’avez encore jamais vu un film de Larry Clark, et dans ce cas il ne faut pas commencer par THE SMELL OF US (c’est en tout cas notre conseil, vous en faites ce que vous voulez ensuite).
Dans la filmographie de Larry Clark, il y a des sujets qui reviennent sans cesse (la drogue, le sexe, la marginalité, la dérive d’une certaine jeunesse, l’ennui aussi), et il y a aussi deux catégories de films (grossièrement parlant) :
1 ) ses réalisations trash sur la jeunesse, comme évoquées plus haut, et rassemblées dans ce qui est aujourd’hui une trilogie
2) et des films clairement plus simples à aborder – même s’ils restent violents en certains aspects -, mais plus classiques dans leur forme (c’est le cas du très bon et troublant BULLY, inspiré d’un sordide fait divers, et qui révélait en 2001 le jeune Michael Pitt. On peut citer aussi ANOTHER DAY IN PARADISE).
Avec THE SMELL OF US, on a pourtant la triste impression que Larry Clark est, pour la première fois, arrivé au bout de lui-même. Archi provocateur, nauséeux, malsain à de très nombreux égards, ce long-métrage suit une bande de jeunes parisiens blancs, passionnés de skate pour la plupart, qui ne font à peu près rien de leur vie. À l’exception de la fille du groupe, scolarisée, les autres garçons semblent avoir autant d’activité dans leurs journées qu’un mollusque accroché à un rocher (et encore, le mollusque doit sans doute être pas mal occupé par son alimentation).
Fidèle à ses habitudes de tournage, Larry Clark a une nouvelle fois casté des adolescents non professionnels, croisés au hasard de rencontres à Paris. Si l’on se doit de reconnaître au réalisateur son talent absolu pour dénicher des jeunes gens absolument pétris de charisme devant une caméra, on est en revanche plutôt atterré par les rôles qu’il leurs confie : des personnages quasi nihilistes, qu’il filme pourtant avec un ultra réalisme qui voudrait nous faire croire que la jeunesse aujourd’hui, c’est ça.
Car le gros souci de THE SMELL OF US, outre le fait qu’il n’apporte strictement rien de neuf dans le discours et le cinéma de Larry Clark qui a déjà filmé des dizaines de fois des scènes de sexe glauques, des visages juvéniles, des jeunes désabusés, consommant sans limites drogues et sexe, c’est aussi qu’il est clairement à côté de la plaque. Larry Clark donne l’impression d’avoir raté une décennie ou même plus, persuadé qu’on est toujours dans les années 90 dans une Amérique rongée par la toxicomanie.
Or, les problèmes de la jeunesse occidentale, aux États-Unis comme en Europe, ont muté et/ou se sont déplacés. Les drogues sont autres, se consomment différemment. La sexualité aussi, a beaucoup changé.
De THE SMELL OF US, on retiendra surtout la découverte de Lucas Ionesco, tête brûlée d’à peine 20 ans, fils d’Eva Ionesco (une mannequin, actrice et réalisatrice française, qui a raconté sa jeunesse trouble et perverse avec sa mère dans le film MY LITTLE PRINCESS avec Isabelle Huppert).
Mais on sait aujourd’hui, au moment de la sortie en salles de THE SMELL OF US, que le tournage fut particulièrement chaotique, certains jeunes acteurs ayant claqué la porte avant la fin du tournage, ou bien d’autres annulant tout simplement leur participation (Gaspard Noé par exemple, aurait dû jouer une des scènes les plus glauques du film).
Cela se ressent quand on voit ce long-métrage, le personnage de Lucas Ionesco disparaissant purement et simplement du dernier quart d’heure du film (alors qu’il était omniprésent auparavant), par exemple.
Bancal, souvent inutilement glauque, vraiment lassant dans sa provocation ultra répétitive, THE SMELL OF US n’a qu’une odeur, celle du renfermé. On y retrouve un cinéaste qui apparaît malheureusement (et peut-être pour la première fois), déconnecté de son époque, lui qui avait pourtant su la saisir avec tant de force il y a de ça 20 ans.
THE SMELL OF US, sortie en France le 14 janvier 2015.
[youtube]http://youtu.be/0uS_fJAOhek[/youtube]
Article rédigé par Elle.
3 réponses sur « THE SMELL OF US : Larry Clark au bout de la provoc … »
Bien vu.
L. Clark c’est plus une atmosphère que la grâce d’un scénario en béton. Souvent il film le vide et le creux. Ici c’est encore plus béant sans être plus profond. Et c’est très moche avec ces caméras numériques. Bcp de retape à l’œil juste bon à hérisser le poil du cul béni qui ce serait trompé de salle. Pour le reste des spectateurs cela reste d’un mortel ennui.
Salut widescreen,
Merci pour ton ressenti sur le film.
Je tiens à dire que j’aime vraiment le cinéma de Larry Clark, BULLY, ANOTHER DAY IN PARADISE, KIDS, sont des films qui m’ont touchée et marquée.
Mais là, THE SMELL OF US me semble tellement vide et vain …
[…] petite amie de Malony), une comédienne que l’on a pu voir un peu plus tôt cette année dans THE SMELL OF US de Larry […]