Brandon Cronenberg est le fils de David Cronenberg. Voilà, ça c’est dit, on peut donc tout de suite passer à autre chose.
ANTIVIRAL, premier long-métrage du canadien âgé de 27 ans, se trouve être le prolongement de BROKEN TULIPS un court-métrage réalisé en 2008 et qui amorçait les thématiques que l’on retrouve ici. ANTIVIRAL nous expose un futur plus ou moins proche, dans lequel la relation entre les fans et leurs idoles ne connaît plus de limites. Afin de se rapprocher toujours plus près de ces stars ultra médiatisées dont les moindres faits et gestes sont épiés en permanence, leurs admirateurs se rendent dans des cliniques privées spécialisées qui leurs proposent de s’injecter les virus et les infections de leurs idoles, qu’ils choisissent sur catalogue.
ANTIVIRAL impose d’entrée une atmosphère très singulière. Les personnages évoluent dans des lieux froids et dépersonnalisés où les lignes horizontales et verticales délimitent le cadre avec une netteté extrême. Géométriques et dominés par un blanc médical, les décors imaginés par le réalisateur retranscrivent cette obsession fanatique, ce culte de la personnalité maladif (dans tous les sens du terme).
On est assez impressionné par cette rigueur formelle jusqu’au-boutiste de la part d’un jeune homme qui réalise son premier film. Il ne laisse rien au hasard, et chaque plan semble avoir été cadré et mesuré avec beaucoup d’exigence.
ANTIVIRAL est aussi un film malade et clinique à la fois. Et pour cause, la première partie du récit se déroule principalement dans la clinique spécialisée où est employé le jeune Syd March, personnage principal. On le suit dans le quotidien de ses journées de travail où il propose à ses clients une large palette de virus prélevés sur les stars. Le principe est que ces virus, une fois injectés aux clients soucieux de communier avec leurs idoles, ont une durée de vie limitée et ne peuvent se transmettre à un tiers.
Film malade, il le devient lorsque la machine s’enraille et que les agissements transgressifs de Syd March finissent par le dépasser. La deuxième partie de ANTIVIRAL s’aventure alors dans des environnements plus glauques et malsains, les décors deviennent plus sombres, sans rien perdre pour autant de cette exigence formelle voulue par Cronenberg fils.
Et puis il y a une troisième partie où le long-métrage bascule dans une science-fiction poussée à l’extrême, gore et arachnéenne, où les corps et les visages sont mis à mal. À certains moments, on est un peu obligé de penser à papa Cronenberg, même si on essaie de se retenir.
ANTIVIRAL explore plusieurs sujets passionnants, inhérents à notre société moderne. Brandon Cronenberg est lui-même à l’origine du scénario, qu’il a élaboré autour de son personnage central. Syd March est le point d’ancrage du film, et les différents thèmes travaillés ici s’articulent autour de lui.
Omniprésent à l’écran, Syd March est interprété par Caleb Landry Jones que l’on découvre véritablement avec ce film. Il faut être très clair, il est la grande force et la révélation de ANTIVIRAL. Le garçon impose son physique très singulier, un corps mince, très pâle, où contraste le roux de ses cheveux longs ; surtout, son visage et son regard sont d’un magnétisme fou et il réussit avec une facilité déconcertante à se rendre terriblement inquiétant. Caleb Landry Jones possède également une diction particulière et articule peu, et cela sert totalement son personnage.
ANTIVIRAL est un premier essai plutôt réjouissant, même si bien sûr il compte son lot de défauts, notamment parce qu’il finit par tourner à un moment à l’exercice de style. Brandon Cronenberg se laisse dépasser par son obsession du cadre et de la mise en scène quasi picturale, et cela malheureusement au détriment de son scénario pourtant si riches d’idées. Son récit et les thématiques qu’il cherche à explorer, pâtissent de son exigence formelle. Si bien que certaines scènes, notamment dans la troisième partie du film, flirtent avec la démonstration scolaire de celui qui a trop bien assimilé son petit manuel de la science-fiction et du cinéma gore.
C’est un peu dommage que ANTIVIRAL laisse s’échapper en route les sujets qu’il aborde comme la célébrité, la quête de la reconnaissance, l’attachement à l’idole, la figure médiatique et iconique de la star. ANTIVIRAL a tout simplement les défauts d’un premier film, mais un premier film réalisé par quelqu’un d’ambitieux, rigoureux à l’extrême, et visiblement obsédé par la mise en scène (ce qui est une belle obsession !)
Brandon Cronenberg signe une première réalisation qui nous donne très envie de voir la suite. Et donc forcément, c’est plutôt bon signe.
ANTIVIRAL, sortie en France le 13 février 2013.
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Article rédigé par Elle.
Une réponse sur « ANTIVIRAL, réalisé par Brandon Cronenberg »
[…] Peter Dinklage (de la Série GAME OF THRONES) et le jeune Caleb Landry Jones (découvert dans ANTIVIRAL en 2013). Toute la distribution du film apparaît comme une évidence tant leurs personnages leur […]