Le Maître du suspense : à la lecture de ces mots, on ne pense qu’à une seule personne, Alfred Hitchcock bien évidemment, le réalisateur britannico-américain aux nombreux chef d’œuvres.
À présent, c’est lui qui est mis en scène dans un biopic réalisé par Sacha Gervasi, qui se concentre sur une période particulière de sa vie. Juste après le succès de LA MORT AUX TROUSSES, adulé par tous, Hitchcock cherche un nouveau projet et plus encore, un nouveau défi. C’est alors qu’il tombe sur un livre racontant l’histoire d’un tueur en série. Le metteur en scène n’a alors plus qu’une seule idée en tête : l’adapter au cinéma, et ce en dépit de l’opposition de tout son entourage. Avec comme unique soutien celui de sa fidèle épouse Alma, il met alors en chantier ce qui va devenir son plus grand succès : PSYCHOSE.
Il n’est pas facile de s’attaquer à un tel mythe du cinéma, une telle icône, et l’idée de ne choisir qu’une période bien précise de son existence peut paraître un choix ambitieux et intéressant, surtout que c’est l’un des moments clés de sa vie. Malheureusement, HITCHCOCK (le film) est très décevant ; car au-delà de ce parti-pris scénaristique, le récit se focalise en réalité sur la relation entre le réalisateur et sa femme Alma, pour dévier ensuite progressivement vers un vaudeville assez creux, sorte de remake de l’éternel cliché du mari cocu. Étrange approche du personnage quand il est pourtant question de porter à l’écran une fiction sur l’un des maîtres du cinéma.
HITCHCOCK passe donc forcément à côté de beaucoup de choses, et surtout de son sujet principal. Au début du long-métrage, on nous fait comprendre que toute l’histoire va essentiellement tourner autour de la mise en chantier de PSYCHOSE (comme une sorte de film dans le film, procédé classique et déjà vu mais toujours attrayant, du moins sur le papier). Pourtant, ce PSYCHOSE qui s’annonçait comme un projet difficile et périlleux, devient vite une simple formalité. Les séquences où Hitchcock tourne (qui pourraient être l’opportunité de nous en dire long sur le caractère de l’homme) sont alors très rares et dénuées d’intérêt. Surtout, elles sont confondantes de banalité et pourraient être des scènes de tournage de n’importe qui d’autre !
Le processus artistique, que l’on nous a vendu au début comme le nœud du film et la clé pour saisir la complexité du personnage d’Hitchcock, passe alors totalement à la trappe.
Évoquons maintenant l’inévitable question qui se pose pour un biopic, à savoir celle concernant l’acteur principal. Le challenge était de taille pour Anthony Hopkins, mais sa carrière parle pour lui. Toutefois, on a davantage l’impression ici d’assister à un concours de sosie plutôt qu’à une réelle interprétation. Engoncé dans son costume et dans son maquillage grossier, Hopkins peine à trouver ses marques et finit par se résoudre à singer Alfred Hitchcock. On en arrive presque à ne retenir du personnage que ses problèmes de poids. La caricature n’est plus très loin.
En revanche, celle qui tire son épingle du jeu c’est Helen Mirren, qui vole la vedette (et c’est un comble !) à Hitchcock lui-même. Elle illumine de son élégance et de sa malice toutes les scènes où elle est présente, et donne un vrai coup d’énergie et de fraîcheur au long-métrage.
Quant au reste du casting, malheureusement il est cantonné à de brèves scénettes qui ne permettent pas de laisser s’exprimer dignement leur talent. C’est d’autant plus dommage qu’un effort particulier avait été porté sur les rôles féminins (Scarlett Johansson et Jessica Biel notamment), car on sait à quel point Alfred Hitchcock aimait les actrices. Ici, elles sont cantonnées à de furtives apparitions où elles n’ont pas la place pour faire exister leur personnage.
L’intérêt de ce film est donc assez limité car on apprend très peu de la vie et du travail de Alfred Hitchcock. Les cinéphiles avertis vont très probablement s’y ennuyer, malgré quelques allusions et références parfois humoristiques. Quant au grand public moins connaisseur du réalisateur, il ne va pas non plus trouver dans HITCHCOCK de quoi assouvir une envie de découverte du réalisateur britannico-américain. La déception risque d’être d’autant plus grande quand les spectateurs devront faire le constat qu’ils sont surtout devant une histoire de couple assez quelconque, et non devant le portrait un peu subtil de Alfred Hitchcock.
Le projet était de taille et vraiment intéressant sur le papier ; pourtant HITCHCOCK ne laisse au final qu’un sentiment d’inachevé, et l’impression évidente que Sacha Gervasi est totalement passé à côté de son sujet.
HITCHCOCK, sortie en France le 6 février 2013.
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Article rédigé par Lui.